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20/05/2009

Le plan France Numérique 2012 : les élus doivent prendre des initiatives !

 

Interview Franck Supplisson

Le père du plan France Numérique 2012

Franck Supplisson.jpg

 

 R&S – Le parcours de Franck Supplisson

 

Ce qui frappe lorsque vous entrez dans le bureau de Franck Supplisson, c’est d’abord son âge. Puis son discours vous révèle l’étendue de l’expertise de ce trentenaire polytechnicien, énarque et inspecteur des finances, véritable boulimique de travail.

 

En 8 ans de carrière, il en a passé 5 dans son domaine de prédilection : le numérique. Dès ses débuts au Ministère des Finances dirigé par Nicolas Sarkozy, conseiller au pôle Industrie dans le cabinet de Patrick Devedjian, il participe aux négociations de l’OMC sur les télécoms, l’audiovisuel et l’Internet (Accord Général sur le Commerce et les Services).

 

Rappelons que cette négociation fut d’une importance capitale pour la France puisqu’elle amenait à une totale libéralisation des télécoms, alors même que l’industrie de l’audiovisuel restait protégée. Les Etats-Unis, qui considèrent depuis toujours les télécoms et l’audiovisuel comme un seul et même marché, souhaitaient une libéralisation totale de ses deux composantes. Les Américains finirent par se ranger derrière la position française, adoubant du même coup notre « exception culturelle ». Une belle victoire pour le cinéma français.

 

Ce jeune haut fonctionnaire est déjà le père de 2 grandes lois sur l’audiovisuel :

 

Il a également travaillé sur l’article 9 de la loi de modernisation de l’économie, traitant du déploiement de la fibre optique.

 

Enfin, il est intervenu sur la loi du 4 août 2005, traitant de la portabilité des forfaits de téléphonie mobile, alors qu’il était conseiller du Ministre des PME. Une loi qui permet de garder le même numéro de portable tout en changeant de fournisseur d’accès.

 

Après avoir dirigé l’équipe Internet de la campagne du candidat Sarkozy, il entre au cabinet du Président de la République en mai 2007, en charge de la nouvelle économie.

 

Le 19 mars 2008, il rejoint Eric Besson, tout juste nommé secrétaire d’Etat chargé du développement de l'économie numérique pour piloter l’ensemble des politiques publiques dans le domaine[1].

 

Il dirige alors les travaux des Assises du Numérique, qui aboutissent au Plan France Numérique 2012, le plan de développement de l’économie numérique voulu par Nicolas Sarkozy, dont l’objectif est de replacer la France parmi les grandes nations numériques à horizon 2012.

 

Le 15 janvier 2009, il suit Eric Besson dans ses nouvelles fonctions de Ministre de l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité nationale et du Développement solidaire en tant que directeur de cabinet adjoint.

 

Enfin, Franck Supplisson est élu au Conseil Régional du Centre depuis 2004, il est aussi adjoint au Maire de Montargis.

 

 

R&S – Vous avez participé au Dividende Numérique. Pouvez-vous nous en détailler les apports ?

 

Historiquement, les fréquences ont été attribuées au fur et à mesure des besoins. Ainsi, Radio Londres a bénéficié d’une fréquence très basse. La télévision analogique, puis les télécoms se sont vues attribuer des fréquences toujours plus élevées. Malheureusement, les fréquences les plus élevées sont aussi les plus mauvaises en qualité (mauvaise pénétration des murs). Les télécoms, arrivées en dernier, se sont vues attribuer les fréquences les plus hautes alors qu’ils en font un usage très dynamique, voire intensif ! Ainsi la technologie qui demande le plus de qualité avait les fréquences les plus mauvaises.

 

Tout est parti d’un constat simple lors de la Conférence Mondiale des Radiocommunications de Genève en novembre 2007 : L’usage des mobiles augmente de près de 40% chaque année. Ils sont très consommateurs de nouvelles bandes de fréquences, pour la voix, la data, la 2G, la 3G, la Télévision Mobile Personnelle... De son côté, l’audiovisuel analogique par broadcasting va disparaître en 2011. Le Dividende Numérique, rétablit une logique d’efficacité en réattribuant les basses fréquences, les meilleures, aux télécoms.

 

La France et la Suède ont été les premiers pays européens à adopter ce plan. Logique pour ces 2 Etats à l’industrie télécom puissante, Alcatel en France et Ericsson en Suède.

 

 

R&S – Force est de constater que les élus français ont pris beaucoup de retard dans la mise en place de services Internet en faveur de leurs administrés. Quelle en est la raison d’après vous ?

 

La France est en retard sur la question des usages de l’Internet. Les Français se passionnent pour les infrastructures. Ils s’intéressent très peu aux services. Souvenez-vous du succès médiatique du Pont de Millau !

 

Les dirigeants politiques de notre pays n’ont pas mesuré l’impact d’Internet, qui s’est développé de façon considérable des 10 dernières années. 43% des foyers français étaient connectés en haut débit en 2007 (source Eurostat). Internet est devenu un media à part entière grâce à son audience. La publicité sur Internet a d’ores et déjà dépassé en volume le hors media et la radio. Eric Besson l’a très rapidement compris lors de sa prise de fonction. Déjà en 2008, lorsqu’il voulait communiquer, il faisait du « bruit » sur Internet.

 

Ce n’est pas le cas des Maires de nos 36 000 communes, dont l’âge moyen atteint 63 ans. Je vous laisse compter le nombre d’entre eux qui n’ont pas grandi avec cet outil…

 

 

R&S – Que proposerait l’élu régional que vous êtes pour améliorer le quotidien des usagers ?

 

Les élus doivent prendre des initiatives !

 

Le Plan Numérique 2012 propose plus de 150 actions, allant du déploiement de la fibre optique au soutien des sociétés innovantes du domaine. La Région doit mettre ses moyens en œuvre pour coordonner les démarches locales, à l’image de ce qui se fait dans le département des Hauts de Seine[2]. La Région doit agir pour généraliser ce genre d’opération aux autres départements de la région, dans le but de réduire toujours plus la fracture numérique.

 

Les sites Internet des régions doivent également devenir interactifs. Ils devraient intégrer de nouveaux services tels le covoiturage ou l’achat de titres de transport régionaux, le maintien à domicile, l’assistance médicale… Le champ des possibles est immense.

 

Savez-vous que voyages-sncf.com, le 1er site de e-commerce en France, est né d’une initiative publique ? La région doit favoriser ce type d’action, qui permettra à la France de devenir une nation leader dans le domaine du numérique ! Tous les métiers peuvent être traités, de la formation professionnelle à la santé.

 

 

Je vous livre 2 exemples concrets.

 

Une société des Alpes Maritimes a mis au point un procédé de contact rapide sur les problèmes de santé des personnes âgées. En cas de problème, elles appuient sur un bouton de la commande de la télévision et entrent en contact avec une infirmière spécialement formée, à l’aide d’une webcam installée sur le poste de télévision. En fonction du degré d’urgence de la maladie, l’infirmière oriente la patiente vers le service adéquat, le médecin local, l’hôpital, le SAMU ou les pompiers. Une manière simple et efficace pour répondre à l’engorgement des urgences des hôpitaux !

 

Dans un tout autre domaine, les transports, surtout en région parisienne, sont un souci quotidien. Chaque matin, l’automobiliste parisien se pose la question s’il doit prendre le périphérique ou un autre chemin. On pourrait imaginer un réseau de webcams installées aux points névralgiques du périphérique, diffusant des images que chacun pourrait consulter sur son téléphone portable.

 

 



[1] Dans le passé ces politiques étaient gérées par différents Ministères, ce qui nuisait à la clarté des décisions prises

[2] Le département des Hauts de Seine veut amener la fibre optique à la porte de tous les logements du département